Le temps passe à une vitesse folle… On m’a réclamé très fréquemment ces dernières semaines un épilogue ou du moins le récit de ces toutes dernières heures et du retour parisien. Je sais à coup sûr que le temps m’a manqué ces dernières semaines pour alimenter le blog mais peut être aussi qu’il est difficile de refermer le livre de cette aventure extraordinaire.
Mais voilà déjà 2 mois que nous avons troqué la barre d’Ysun contre nos plus classiques cartes de transport en commun! Dur retour à la réalité? Tout ces miles pour revenir à notre condition d’Homo Parisianus ?
Le grand « retour » c’est finalement un sujet que nous évoquions presque avec tous depuis que nous avons décidé de partir. Nous y voyions presque un sujet d’inquiétude profonde dans les yeux de nos interlocuteurs et amis. Il y avait, au mieux ceux qui nous plaignaient de devoir mettre un terme à 10 mois de Tropiques idylliques, à l’extrême parfois ceux qui pariaient à demi ton sur une reconversion prochaine de nos vies de citadins ou de travailleurs acharnés. On nous promettait de brillantes carrières de chevriers dans le Larzac! Peut être même qu’il y avait ceux qui, moins nombreux espérons le, imaginaient que nous serions incapables de reprendre les rennes.
Et si finalement ces craintes étaient juste l’expression refoulée de leur propre envie de « larguer les amarres » ou de vivre leurs rêves? Il est souvent plus facile de reporter ou de ne pas mettre en oeuvre ses projets en se disant que le retour est tellement difficile et inéluctable qu’il est plus facile de ne pas partir. Mais personne ici n’a jamais affirmé que la facilité était une fin en soi et il faut savoir se dépasser, sortir de sa zone de confort pour vivre ces expériences qui nous structurent et nous font aller de l’avant.
Au bout de 2 mois nous pouvons affirmer qu’aucun bouleversement ou catastrophe n’est encore advenu et si un voyage tel que celui ci nous transforme de l’intérieur, il n’a rien bousculé au sens propre dans nos vies (hyper)actives. Nous sommes toujours autant accrochés à nos vies professionnelles et, mieux, nous avons des projets plein la tête de ce coté là! Le retour à la vie citadine a également marqué le retour à une vie sociale intense et à la vie culturelle pour laquelle Paris se montre probablement plus prodigue qu’une île déserte au milieu des Caraïbes.
Il faut savoir apprécier chaque instant et nous avons savouré chaque escale, chaque île et chaque rencontre sur l’eau comme nous apprécions aujourd’hui de revoir nos amis et de partager ces souvenirs avec eux.
Mais ne boudons pas notre (dé)plaisir. Après un retour tranquille au début du mois d’Aout, nous avons bien entendu été aspirés par la spirale subie ou provoquée des rentrées en tout genre et par notre propension à nous investir dans un nombre déraisonnable d’activités. Aurions nous plus peur du vide que du Grand Large?
En soi, le voyage a été une manière de prendre un recul géographique et psychologique salutaire avec cette vie bien pleine pour en retrouver le sens profond. En saisir aussi les limites. Car lorsque, par exemple, en pleine mer on parle de risque, quand toute la famille est de l’aventure, cela à une tout autre signification que l’évocation du risque dans une vie professionnelle ou terrienne.
En cela notre aventure marine est une chance pour la vie de terriens. Elle nous incite à croire en nos capacités d’adaptation, à lever sans cesse l’ancre pour des horizons inconnus. Non pas que nous n’étions pas en pleine félicité, harmonie ou émerveillement sur nos plages de rêve des Iles Vierges ou des Roques mais comme le disait St Augustin : « avance sur ta route, elle n’existe que par ta marche ». La vie est un mouvement perpétuel.
Pour faire bonne mesure et parler de difficultés, il y a peut être celle de réussir à partager notre enthousiasme et ce que nous avons vécu. Nous avons habité sur une « autre planète » pendant 10 mois. Ni nos collègues et amis comparant, non sans approximation, cet épisode à de (très) longues vacances, ni même des marins habitués des sorties à la semaine ou au week end, ne peuvent saisir toute la nature complexe de cette expérience familiale.
Probablement que disposer de 10 mois nous place dans une autre dimension temporelle, la navigation en mer nous décale aussi dans l’espace en nous projetant en permanence dans une immensité qui nous dépasse. Enfin, vivre en famille 24h/24 et 7j/7 avec des enfants petits et notre conjoint nous fait vivre dans une configuration que peu de personnes peuvent connaître dans la vie de tous les jours. Un triple décalage donc, qui fait que nous ne sommes réellement à l’aise que lorsque nous avons le plaisir de partager nos expériences de mer avec ceux qui sont rentrés de ce même type de voyage.
Sinon, comment résumer 10 mois? Sur sa planète lui aussi, le Petit Prince dirait que « les grandes personnes aiment les chiffres ».
Aux grandes personnes je parlerais des 19 pays, des 300 levers et couchers de soleil, des 20 nuits passées en mer sous des myriades d’étoiles, des 61 îles sur lesquelles nous avons posé le pied ou encore des 8500km parcourus.
A ceux qui ont gardé leur âme d’enfant, je conterai les plages vierges et désertes de l’archipel des Roques, au large du Venezuela, ces rencontres magiques avec des dizaines de baleines à bosse en République Dominicaine, avec des dauphins dans l’eau cristalline des Bahamas… Nous avons fait une boucle en parcourant la mer des Caraïbes dans le sens des aiguilles d’une montre depuis la Martinique et sommes passés à Grenade, au large du Vénézuela, en Jamaïque, aux Iles Cayman, à Cuba, en République Dominicaine, à Porto Rico, aux Iles Vierges, à St Martin, en Guadeloupe et j’en oublie ! Partout, une eau turquoise à 28°, des cocotiers, du sable blanc, de belles rencontres et des endroits incroyables que seuls les navigateurs peuvent découvrir, loin du tourisme de masse et des sentiers battus.
A tous les candidats au voyage, et ils sont nombreux (3 familles qui vont partir nous ont déjà contactés!), je dirais que la préparation du retour est essentielle si vous voulez réussir votre voyage. Pour le reste, rien n’est probablement aussi difficile que ce qu’on pourra vous faire croire autour de vous!
Foncez, ça vaut le coup et peut être à une prochaine fois sur l’eau car j’aime à penser que nous n’avons pas dit notre dernier mot!
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