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oct 28

Passage chez le garagiste… à sec

Je m’apprêtais à faire un article sur l’accueil de nos amis Ann et Jérome à bord  et de leur petite famille, Luca, 4 ans et Alicia, 4 mois qui sera vraisemblablement la plus jeune navigatrice du bord et voilà que nous sommes depuis quelques jours sur un bateau… Sur terre!

Samedi matin en sortant d’un mouillage à Cariacou, petite île au Nord de Grenade, au moment d’embrayer le moteur babord, je ressens de violentes vibrations qui me font immédiatement arrêter le moteur. Apparemment nous sommes en panne et je contacte notre loueur pour connaître ses instructions.

Pas de doute, pour réparer le moteur, il nous faut mettre le bateau hors de l’eau dans un chantier au Sud de Grenade. C’est donc 5h de navigation qu’il nous faudra faire de nouveau alors que nous avons parcouru cette route du Sud de Grenade jusqu’à Cariacou la veille seulement.

Pour nos invités qui commencent à peine à s’amariner c’est une petite épreuve supplémentaire. Pour moi, c’est la tension d’avoir à gérer une panne plutôt sérieuse qui nécessite de mettre le bateau hors de l’eau et qui nous prive d’un moteur. Mais nous sommes prévenus, à bord les avaries et pannes en tout genre arrivent fréquemment. Je n’ai pas fait un stage de mécanique en juillet pour rien!

Lever un bateau hors de l’eau est une première également.

Nous touchons la petite crique de St David vers 14h le 26 octobre. Ici c’est une escale technique pour de nombreux navigateurs. La langue dominante des navigateurs qui arpentent le petit bar jouxtant le plage est la langue de Molière. Navigateurs au long cours venus sortir leur bateau de l’eau et le stocker ici pour quelques mois, le temps d’une pause ou d’une saison cyclonique ou encore le temps de faire la maintenance du bateau.

Car en effet, sur un bateau, même si de nombreux travaux peuvent être réalisés à flot, un certain nombre d’autres comme la réparation de notre moteur ou la peinture de la coque doivent être réalisés hors de l’eau.

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Quand on arrive sur le “Yard”, on dirait “port à Sec” en français, surtout un dimanche soir, se dressent face à nous deux immenses allées de bateaux posés sur des cales. Pas âme qui vive dans les environs mis à part les gardes de sécurité à l’entrée. Le ciel est gris, la scène en est d’une intensité dramatique qui me prend au ventre. Peut être la vision de ces montres de plus de 12 mètres pour la plupart, qui, tels l’Albatros de Baudelaire, ont les aîles coupées et semblent si patauds tout à coup. Peut être également un peu plus ce soir alors que nous devons faire cette réparation de première importance sur le bateau et que nous venons de naviguer 5h dans une mer plutôt agitée sur la côte au vent de Grenade. J’aurais tellement voulu offrir à nos amis cocotiers et sable blanc sans concession… Mais la voile c’est un ensemble: les découvertes et la mécanique. A ce stade nous ne savons pas exactement quel est le problème et si notre temps ici se comptera en heures ou en jours.

Au petit matin, après une nuit particulièrement agitée à bord car la houle rentre dans la petite crique, nous débarquons à terre en annexe tout les passagers  afin d’épargner aux estomacs éprouvés l’aigreur d’un petit déjeuner version aller-retour marin.

Tout à coup le chantier désert de la veille s’anime. Le bureau ouvre, je suis le premier à y rentrer, coordonnant les actions de notre loueur et du chantier pour pouvoir sortir le bateau de l’eau dès que possible. C’est désormais planifié, dans quelques minutes je conduirai le bateau dans la cale qui permettra au travel-lift, immense grue sur roues de soulever notre bateau et de le poser sur les cales.

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Les hommes  du chantier sont des professionnels aguerris et la manoeuvre est plus facile que ce que j’aurais pu imaginer, la principale difficulté se trouvant être la marche arrière avec un catamaran ne disposant plus que d’un seul moteur. Evidemment, toute tentative de mettre les gaz vers l’arrière se transforme en une rotation du bateau sur lui même qui n’est plus compensée par l’autre moteur et qui met le bateau de travers. Et quand on doit rentrer en marche arrière dans une cale (on va dire l’équivalent d’un “box” de parking pour une voiture) dont la largeur est approximativement celle du bateau, cela devient gênant… Heureusement, à la fin de ma marche arrière, un dinghy du chantier corrige les quelques degrés qui manquent au bateau pour rentrer droit mais je suis plutôt satisfait de la manoeuvre. Anne en équipière de plus en plus confirmée et Jérôme en équipier débutant remplissent admirablement leur rôle: protéger le bateau avec les pare battages et lancer les aussières à terre aux gars du chantier qui réalisent l’opération au moins une dizaine de fois par jour et restent d’un zen infini comparé à mon taux d’adrénaline au plafond.

Ensuite, il n’y a plus rien à faire soi même. L’immense grue, le Travel-lift, qui a préalablement positionné ses sangles sous l’emplacement dans lequel on a mis le bateau, les soulève alors et lève le bateau. Nous restons à bord pour le début de l’opération puis quittons le bateau alors que les techniciens finissent de le sortir de l’eau et que le travel-lift passe en fonction “travel” et dépose doucement le bateau sur des cales à terre.

Voila, notre beau catamaran et fidèle destrier est maintenant cloué au sol avec les autres, comme on entre dans la salle d’attente d’un médecin en attente d’un diagnostic et d’un traitement.

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Nous devrions être de nouveau à flot demain soit un travail d’une rapidité exemplaire des hommes de l’art qui ont démonté le sail drive ou arbre d’hélice, changé la pièce défectueuse et remonteront le moteur demain.

Cette nuit nous dormirons dans un mouillage qui ne bougera pas et avec vue sur terre… Plutôt original comme aléa.

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4 comments

2 pings

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  1. Guillaume

    Bien joué et courage !

    pour une première avarie (et j’espère la dernière) ça s’est à priori plutôt bien passé…

    Bon vent

    1. Stéphane

      Oui, merci Guillaume. On a finalement bien géré et on avait de très bons contacts techniques sur le chantier.
      J’espère que tout va bien chez Sopra, je suis bien loin du boulot en ce qui me concerne :)

  2. Blanchet

    Ah ,vous m’avez inquiétée sans nouvelles depuis plusieurs jours je me demandais ce qui se passait. Me voilà rassurée! Alors bonne attente , ‘Anne peut faire quelques dictées et des problèmes en attendant le retour sur l’eau….. Bon courage à vous cinq! Bisous

  3. Blanchet

    Alors toujours à sec???? Racontez nous vos journées… J’ai pensé à vous en voyant le départ de la route du rhum, vous au moins vous n’êtes pas loin du rhum…. Bon courage!

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